Au-delà de l’éthique, faut-il avoir peur économiquement des
migrants ?
Faut-il donner raison à Michel Rocard quand il disait que « la
France ne peut pas accueillir toute la misère du monde ! » ou
reprendre un vieux slogan du Front National « «1 million de chômeurs,
c'est 1 million d'immigrés en trop. Les Français d'abord.» Ironie économique de
l’histoire, les pays qui ont fermé les frontières ont toujours périclité.
Dans les années 70 et 80, nous avons accueilli 120 000 vietnamiens
(boat people) quand bien même nous étions confrontés aux chocs pétroliers. Cela
n’a pas occasionné de problèmes majeurs.
Les migrants ce sont avant tout des jeunes actifs qui
cherchent à travailler. D’ailleurs, ils cherchent avant tout à rejoindre l’Allemagne,
le Royaume-Uni ou l’Europe du Nord. Ces migrants qui ont pris des risques
importants pour franchir les frontières sont, en règle générale, mus par un
fort instinct de survie et donc une volonté de réussir plus forte que la moyenne.
De nombreuses études économiques issues notamment de l’OCDE
soulignent que les travailleurs immigrés rapportent plus qu’ils ne coûtent. Le
montant des impôts qu’ils acquittent est supérieur au montant des prestations
qu’ils perçoivent.
Les migrants sont des consommateurs à fort potentiel. Il ne
faut pas oublier que nous sommes avant tout consommateurs entre 0 et 35 ans.
Après, notre niveau de consommation stagne puis baisse. Les migrants n’ayant
rien ou presque doivent s’équiper. Cela a un impact positif pour la croissance.
La France a connu ses meilleures années de croissance dans
les années 60 quand nous avons accueilli plus d’un million de Français d’Algérie
et plusieurs millions de travailleurs immigrés.
Mais ces migrants, ne vont-ils pas prendre le travail des
nationaux ?
La réponse est loin d’être évidente. En effet, en France, il
y a 500 000 emplois vacants. Peu de résidents souhaitent travailler dans
la restauration ou dans le bâtiment. L’apport de nouveaux actifs a plutôt
tendance à dynamiser le marché du travail.
La France est au regard de sa population un des pays qui
accueille le moins d’immigrés en Europe, autour de 80 000 par an contre
plus de 500 000 en Allemagne. Or, le taux de chômage ne baisse pas en France.
Nous ne pouvons pas comparer la situation de la France et de
l’Allemagne. L’Allemagne avec sa dénatalité et son plein emploi a besoin des
travailleurs immigrés à la différence de la France.
Oui, la situation allemande diffère de celle de la France.
Le taux de chômage est de 6,4 % contre 10,3 % en France. Il y a un manque d’actifs
dans de nombreux secteurs d’activité. L’Allemagne doit faire face à une
dénatalité. Quand en France, le taux de fécondité est de près de 2 ; il
est de 1,3 en Allemagne Sans l’apport des travailleurs immigrés, la population
allemande reculerait.
Néanmoins, la France vieillit également. Les personnes de
plus de 60 ans représenteront le tiers de la population en 2040 contre 25 % aujourd’hui.
La population active devrait diminuer après 2020. Or, nous devons financer nos
dépenses de retraite, nos dépenses d’assurance-maladie. L’apport de jeunes
actifs est donc loin d’être inutile pour assurer la pérennité de notre système
de protection sociale.
Il n’y a donc pas de contradiction entre l’éthique et l’économie.
Les Allemands l’ont bien compris en acceptant l’implantation de nombreux
migrants. La question à se poser, c’est de savoir comment nous pouvons les
accueillir pour éviter les échecs passés en matière d’immigration.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire