Avec un recul du PIB de 5,5 % au premier trimestre 2011 et un taux de chômage de 16 %, la Grèce est sous pression sociale, économique et financière. Dès la fin de l’année 2009, il était connu que la Grèce devait faire face à un calendrier impossible. Du fait d’une duration courte de ses emprunts, les échéances les plus importantes étaient programmées en 2010, 2011 et 2012. L’année dernière, la Grèce a pu bénéficier d’un plan d’aide de 110 milliards d’euros. La mise en place d’un plan d’assainissement a permis de réduire le déficit public d’environ quatre points. Il devrait passer de 14,7 % en 2009 à 10,3 % en 2011. Cette réduction ne permet pas une stabilisation de la dette publique qui devrait s’élever à 157,7 % du PIB en fin d’année contre 142,8 % en 2à10. Elle pourrait atteindre 166 % en 2012. Par ailleurs, les taux grecs à deux restent supérieurs à 10 % et ont même atteint 27,55 % le 16 juin.
Face aux échéances de remboursement, un nouveau plan d’aide est indispensable ; il devra se situer autour de 100 à 120 milliards d’euros. Il faudra sans nul doute rééchelonner la dette grecque avec une garantie européenne.
L’idée d’une banqueroute grecque provoquerait une onde choc qui risquerait de faire exploser l’Europe, de nombreuses banques et l’euro par effet de contagion sur le Portugal, l’Espagne ou l’Irlande…
Pourquoi faut-il aider la Grèce ? En aidant ce pays, nous nous aidons nous-mêmes en évitant l’implosion de la sphère financière européenne. En outre, si la Grèce est dans une situation plus que délicate, elle le doit à une mauvaise gestion publique mais aussi à l’incapacité de l’Europe et de ses Etats membres à vérifier le respect des fameux critères de Maastricht et de prendre les mesures de sauvegarde nécessaires. En la matière, il y a eu défaillance dans les instruments de contrôle. Les Etats membres ne se sont pas également penchés sur la question clef du fonctionnement d’une zone monétaire. Aux Etats-Unis, la mobilité de la population et l’existence de fonds pour corriger les divergences économiques entre les différents Etats permettent d’atténuer les chocs économiques internes. Il en est de même au sein de l’Allemagne fédérale où les dispositifs de péréquation sont très importants entre les Länder. Or, rien de comparable n’existe au sein de la zone euro.
L’Allemagne a-t-elle intérêt à aider la Grèce ? Oui car il ne faut pas oublier que les pays de l’Union européenne sont les principaux acheteurs de produits « made in Germany ». La population allemande est vieillissante et diminue. Les parts de marchés ne sont pas en Allemagne mais au-delà des frontières. Les Grecs, les Espagnols, les Italiens voire les Français ont acheté des produits allemands se traduisant par une balance commerciale excédentaire. Ces achats effectués à crédit ont contribué à la croissance de l’économie allemande. L’impossibilité de jouer sur la valeur de la monnaie pour corriger les déséquilibres nécessite que d’autres instruments prennent le relais. Une dévaluation appauvrit le pays concerné et améliore la compétitivité de ses exportations. Le pouvoir d’achat extérieur est réduit et les capacités d’exportation augmentées. A défaut de pouvoir dévaluer, il faut bien que ceux qui profitent de l’avantage compétitif paie leur aumône.
La sortie de l’euro constituerait un terrible échec et une source de déstabilisation. Si la Grèce recourait à une telle solution, la banqueroute serait quasi automatique avec une longue période d’assainissement. Nul ne voudrait reprêter à ce pays durant des années. La forte dévaluation serait synonyme d’un appauvrissement. Le risque de contagion aux autres pays en situation de vulnérabilité serait fort. L’Allemagne et la France seraient perdantes en termes d’exportations d’autant plus que compte tenu des importations croissantes de matières premières et d’énergie, la dépréciation de la monnaie dégraderait la balance commerciale. Elle marquerait une rupture dans le processus de construction européenne déjà mis à mal depuis l’échec du référendum en France en 2005.
Face à la crise grecque, le temps est plutôt à l’égoïsme d’où l’impression persistante d’une Europe qui court après l’évènement. L’absence de volonté pour aller vers plus de fédéralisme au niveau économique et financier, vers une coordination plus forte des politiques économiques et budgétaires constitue un réel frein pour la résolution de la crise.