dimanche 17 mai 2009

EUROPE, PARIER SUR L'EST

L’Union européenne n’est pas une Europe politique ; elle ne l’a jamais été et ne devrait pas le devenir à court ou à moyen terme. La construction européenne est avant tout celle des marchands, des idéalistes qui considéraient qu’en commerçant entre Français, Italiens, Belge, Luxembourgeois, Hollandais et Allemands, la guerre deviendrait impossible.

Ce doux rêve est désormais une réalité et c’est au nom de ce principe que l’Europe a intégré les pays de l’Europe de l’Est rendant ainsi plus difficile l’hégémonisme russe.

La construction européenne est devenue le label des pays démocratiques qui jugent la guerre inutile pour régler des conflits interne au Continent.

Les projets politiques déclarés en tant que tels ont échoué que ce soit la Communauté Européenne de la Défense en 1954 ou le Traité Constitutionnel en 2005. Il faut, à ce titre, souligner que dans les deux cas, c’est la France qui s’est opposé à la mise en place d’une Europe plus politique.

En revanche, les avancées économiques ont été couronnées de succès : le marché commun, la politique agricole commune, le marché unique, la monnaie unique.

L’Europe n’a pas à rougir de son bilan. Elle a réussi de passer de 5 à 27 membres d’intégrer l’Espagne, la Grèce et le Portugal qui sortaient de la dictature. Elle a réussi à intégrer la quasi-totalité des pays du pacte de Varsovie qui durant plus de quarante ans avaient été transformés en satellites de l’URSS. Elle a même intégré d’anciens pays qui avaient été intégrés à l’URSS comme la Lettonie, la Lituanie ou l’Estonie.

A 15, c’était difficile mais A 27, l’Union européenne ne peut pas être une force politique compte tenu qu’elle est plurielle tout à la fois anglo-saxonne, latine voire slave. Elle possède trois grandes capitales, Londres, Paris et Berlin et de nombreux autres centres comme Barcelone, Milan ou Prague voire Varsovie. Les partisans d’une Europe fédérale sont rares et la communauté de destin qui lie les Européens les uns aux autres n’est pas encore suffisamment partagée pour permettre une avancée dans la construction européenne.

En récusant ses origines, l’Europe a perdu de son sens. Elle est devenue conservatrice et tente d’ériger de bâtir des murs virtuels pour échapper à de supposées menaces.

Or, tout Empire qui préfère les lignes Maginot à l’esprit d’expansion ou de progrès est voué à décliner. Le vieux continent le sera réellement du fait des évolutions démographiques en cours. La population a commencé à décliner. Les taux de fécondité de l’Italie et des pays d’Europe centrale figurent parmi les plus faibles du monde. L’Europe, d’ici à quelques années, devra faire face à des charges de retraite, d’assurance maladie et de dépendance qu’elle ne pourra financer qu’à condition de rester une région prospère, dynamique. Or, cela suppose de poser la question de l’élargissement et des partenariats.

Faut-il récuser le droit à la Turquie d’entrer dans l’Union européenne ? La Turquie ne fait-elle partie du Conseil de l’Europe, de l’OTAN depuis sa création ? La France, Etat laïque refuserait-elle à un pays laïque mais peuplé majoritairement de Musulmans d’intégrer l’Union européenne ?

La Turquie en se trouvant à la frontière de l’Irak et de son voisin l’Iran sera dans les prochaines années un des pays clef du développement de la zone arabo-persane. Déjà, les entrepreneurs turcs rayonnent dans l’ensemble de la région. Par ailleurs, il ne faut pas oublier que la France comme l’Allemagne sont déjà implantées en Turquie bien plus que dans certains pays membres de l’Union.

Quand les 12 ont intégré l’Espagne, le Portugal et la Grèce, un pari avait été fait : celui que ces pays demeureraient des démocraties et qu’ils rattraperaient rapidement leur retard économique. Ne faut-il pas réaliser le même pari avec la Turquie ?

La question de l’appartenance au continent européen est secondaire. L’Empire Ottoman n’a-t-il pas été partie prenante de tous les grands conflits qui ont marqué l’histoire européenne ?

La Turquie est un marché à fort potentiel avec une population en forte croissance et qui servira de base pour développer les exportations des Etats membres vers l’Iran quand ce pays s’ouvrira et vers l’Irak.

De même, il est nécessaire de poser la question de la Russie, ex grande puissance qui entend le redevenir au plus vite. Ses richesses naturelles lui ont permis d’effacer les traces de l’effondrement des années quatre-vingt-dix. En revanche, elles ne lui ont pas encore permis de s’arrimer au Continent et de connaître une croissance économique équilibrée. En revanche, dès le retour de la croissance, la Russie retrouvera du cash et un rôle clef en Europe et en Asie.

La Russie a la même tentation que les Etats-Unis, le repli sauf qu’il a pour les deux pays des significations différentes. Le repli russe signifie autant que possible de reconstruire l’Empire ex-soviétique. De ce fait, l’Union européenne a une partie de son territoire dans l’espace de conquête de la Russie. Comme au temps du Traité de Rome, pour éviter les tentations de se transformer en actes, il faudra éviter l’irrédentisme russe. Tout comme la Turquie, la Russie a toujours été un membre affluent du concert des nations européennes.

Les Etats membres de l’Union européenne ont tout intérêt à attirer les capitaux russes qui seront courtisés par la Chine et les autres pays d’Asie. L’Europe a besoin de capitaux pour régénérer son capitalisme ; elle a besoin de matières premières et de l’énergie. Elle a besoin de nouveaux marchés. La Russie lui offre les trois et cela à ses frontières.

Les Allemands l’ont bien compris et jouent déjà en solitaire la carte de la Russie. La France semble hésiter or cette ouverture vers l’Est est inscrite dans les gènes de l’Europe et qui a été construite au nom de la paix et de l’économie. L’Europe, c’est une affaire de charbon et d’acier, c’est une affaire d’énergie et de commerce. IL faut revenir aux fondamentaux pour lui redonner du souffle.

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