mercredi 25 juillet 2012

la zone euro a-t-elle raison d'avoir peur du mois d'août ?


Jusque dans les années 90, le mois de tous les dangers, de la crise de 1929 au krach de 1987 en passant par le premier choc pétrolier en 1973 ou le second en 1979 était octobre. L’automne était propice aux dérèglements économiques et politiques en tout genre. La crise de 2008 a également pris tout son relief à partir des mois de septembre et octobre.

Est-ce l’été qui génère des prises de conscience, qui révèle les dysfonctionnements ? Et il faut noter que la montée vers les crises ont tendance à se rapprocher du mois d’août quand avant elle intervenait fin octobre. On peut y voir l’effet de l’accélération de la diffusion des informations.

La crise des dettes publiques européennes est devenue un feuilleton estival. En 2011, il a tenu en haleine spécialistes et journalistes durant tous le mois d’août. Cette année, une fois depuis, l’Europe risque d’être au cœur de l’actualité à son corps défendant.

Après la Grèce, est-ce l’Espagne qui sera en première ligne ? Le niveau d’endettement de ses banques et la raréfaction des ressources pour les régions du fait de l’effondrement du secteur immobilier.

Le plan de sauvetage décidé au mois de juin ne suffira pas pour résoudre les problèmes espagnols. L’Espagne est confrontée à une récession et à une progression très dangereuse de son chômage.

Face à la remontée des taux qui dépassent 7 % dans la péninsule ibérique et face à la menace de perte du triple A pour l’Allemagne du fait de son rôle de pompier de la zone euro, des rumeurs circulent sur une sortie de l’Espagne et de la Grèce de la zone euro en plein mois d’août.

De telles rumeurs sont assassines et irrationnelles. Une sortie de l’Espagne signifierait l’éclatement de la zone euro. Une zone monétaire repose sur la solidarité et la confiance. Si un des membres ne pouvait pas être sauvé du naufrage, les investisseurs ne croiraient pas en la possibilité des Etats membres de sauver un autre Etat en difficulté. La défiance s’installerait et exigerait de la part des Etats membres de l’Union de prendre des mesures radicales, c'est-à-dire d’aller à toute vitesse vers le fédéralisme faute de quoi la fin de l’euro s’avancerait à grande vitesse. Le refus d’aider un pays en difficulté aurait pour conséquences de forcer les Etats membres d’aller dans une direction qu’ils refusent. L’ironie, c’est qu’un départ d’un pays de la zone euro pourrait générer des politiques qui pourraient sauver la Grèce, l’Espagne et d’autres de l’effondrement. Mais un tel comportement est pyromane avec le risque d’un feu incontrôlable. Le prix à payer d’une disparition de l’euro est en état difficilement quantifiable ; certains l’ont évalué à 10 % du PIB de la zone.

Les oiseaux de mauvais augures seront donc attentifs à la date du 15 août qui est toujours charnière dans l’année. C’est un 15 août que Richard Nixon a mis fin à la convertibilité du dollar en or en 1971. Le 15 août est tout à la fois une fête religieuse et une date de fin de vacances estivales. Pour surprendre les marchés et les journalistes, il est fréquent de retenir cette date mais à force d’être utilisée, la ficelle est devenue un peu grosse. Surtout, il faut espérer que le psychodrame européen n’aura pas lieu. Il est après plusieurs années de tensions au sein de la zone euro que des solutions doivent être trouvées pour obtenir l’indispensable assainissement tout en offrant des perspectives de croissance.

L’Europe doit se réindustrialiser et doit se réconcilier avec le progrès. La croissance, c’est du capital, du travail et du progrès technique avec si possible de l’énergie à bon marché. L’Europe manque pas de capital et dispose d’un fort volant de force de travail inemployée. Il faudrait renouer avec ce qui a permis à l’Europe de devenir le centre du monde au 19ème siècle, les innovations. En matière d’énergie, la volonté européenne et surtout française de privilégier le principe de précaution au détriment du principe de réalité contribue à freiner la croissance. Plus de 20 % de la croissance actuelle des Etats-Unis s’explique par la baisse des prix de l’énergie liée aux gaz de schistes. Trouver les moyens d’exploiter le plus proprement possible ces gaz en lieu et place d’interdire toute exploitation s’impose au nom de la raison économique.

L’Europe ne peu se résumer à la réduction des déficits faute de quoi les peuples pourraient prendre parti pour les extrémismes quand ils ne le font pas déjà.

Le conflit entre l’Allemagne et la France sur la croissance est stérile car il repose sur deux visions économiques radicalement opposées. L’Allemagne juge nécessaire et prioritaire avant toute chose d’assainir les comptes car ce sont les épargnants allemands qui paient pour les consommateurs étrangers. Le Gouvernement français juge indispensable de relancer l’économie pour permettre aux Etats endettés de rembourser. Il faut donc que les Allemands et quelques autres continuent de payer pour espérer être remboursées. Les deux logiques se tiennent à la nuance près que la relance de l’économie ne doit pas aboutir à l’accélération du processus de désindustrialisation qui est en cours en Europe du Sud depuis 10 ans. Contrairement à une idée reçue, la désindustrialisation est la conséquence d’une spécialisation au sein de la zone euro, au Nord, les emplois manufacturiers, au sud, le tertiaire. La relance économique prônée par certains aurait comme impact l’augmentation des importations et des déficits des pays endettés. Il est impossible de substituer d’un coup de baguette magique une production nationale à une production étrangère. Le Gouvernement allemand a raison qu’une simple politique de relance n’est que cautère sur une jambe de bois. Faut-il pour autant rejeter toute idée de relance. Il est important de redonner du souffle, de lancer un new deal à l’européenne avec une mobilisation des capitaux afin de relancer l’économie non pas par la demande qui génère essentiellement des importations mais par l’offre et par les infrastructures qui sont sources de croissance à venir. L’Europe a déserté le terrain de l’avenir prisonnier qu’elle est par le phénomène du vieillissement et du zéro risque. Les pays membres doivent trouver des projets intégrateurs contribuant à solidifier les liens entre eux. Les transports, les universités, les centres de recherche, un projet spatial, un projet environnemental…. les pistes sont nombreuses avec des possibilités de forts effets de leviers.

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