mardi 20 décembre 2011

L'obscurantisme économique ou comment éviter que quelques préjugés ne deviennent des vérités ?




La crise économique et financière offre de nombreux raccourcis économiques qui pourraient être savoureux voire comiques s’ils n’étaient pas porteurs d’illusions et de fantasmes.

Retour sur l’idée que tout irait mieux sans bénéfice et sans dividende

Ainsi, l’idée que les dividendes ne doivent plus être versés reçoit une large approbation en France. J’ai sur ce sujet entendu que les entreprises avaient le droit de réaliser des bénéfices mais que distribuer des dividendes en période de crise n’était pas éthique.

Les notions de bénéfices et de dividendes sont, en règle générale, très mal appréhendées en France. Il est le symbole de l’exploitation, de l’argent gagné en dormant. Notre tradition catholique rejoint notre tropisme marxiste.

Il faut souligner que chez les classiques comme chez Marx, le profit est voué à disparaître, à tendre vers zéro. La baisse du profit est liée à l’augmentation de la population (Ricardo) ou à l’augmentation de la concurrence qui pèse sur les prix (Adam Smith). Certes, chez quelques classiques comme Marshall ou Say, le profit est le produit naturel de l’activité de l’entreprise ou de l’organisation. L’activité de l’entreprise est un facteur distinct du capital et du travail et doit être rémunéré en tant que tel.

Chez Marx, la loi des rendements décroissants qui oblige une augmentation croissante du capital entraîne mécaniquement une baisse du taux de profit. Pour les marxistes, le profit est généré par la plus-value apportée par le travail. Il symbolise l’exploitation du facteur travail.

Chez Schumpeter, le profit est également temporaire comme l’expression d’une phase transitoire liée à la rente procurée par l’innovation. Le profit est le fruit de l’innovation. Le profit disparaîtra à partir du moment où l’innovation se diffusera. Seules de nouvelles innovations permettent au profit de se maintenir.

Le profit est le compagnon de route de l’entreprise. Pour ces auteurs classiques, le profit est un indicateur et un outil.

Ø      Le profit est un critère de choix, un instrument de décision
Ø      Le profit est un critère de l’efficacité relative des entreprises
Ø      Le profit est une source de financement
Ø      Le profit est une source de revenus
Ø      Le profit est une source de répartition et d’accroissement du capital

Le profit peut être le résultat d’une bonne efficience, le résultat d’innovations, le résultat d’un savoir-faire. Il peut être aussi le résultat d’une rente de situation ou d’un monopole. Il peut être généré par la cession d’actifs, par le savoir-faire, par une réduction des coûts, par un dépeçage de l’entreprise... Il peut être généré par la corruption, par un trafic illégal ou par l’exploitation des salariés… Au niveau comptable : le profit est le solde résiduel entre les charges et les recettes d’exploitation

Le profit est la plus-value dégagée par la cession d’un bien ou d’un service : différence entre le prix de vente et de l’ensemble des coûts. Le profit est la rémunération du ou des propriétaires du capital qui ont porté le risque. Il est aussi la conséquence d’un avantage d’ordre matériel, intellectuel ou moral qu’une personne ou qu’une collectivité peut tirer de quelque chose. Toute action est susceptible de générer un profit. Au niveau macro-économique et de la comptabilité nationale, le profit correspond à l’excédent brut d’exploitation. La part distribuée aux salariés est enlevée de ce profit.

Ce profit brut est réparti entre cinq usages :

Ø      Le paiement de l’impôt sur les sociétés
Ø      Le versement d’intérêts net des intérêts reçus
Ø      La distribution de revenus aux propriétaires du capital, nette des mêmes revenus reçus
Ø      Diverses autres opérations (prestations sociales versées au régime employeur.)
Ø      L’épargne qui reste disponible pour l’autofinancement

Le profit peut s’assimiler au bénéfice comptable, le résultat de l’entreprise qui est versé :

Ø      Sous forme d’impôt aux collectivités publiques
Ø      Aux actionnaires
Ø      Aux salariés sous forme d’intéressement et participation
Ø      A l’entreprise pour l’autofinancement

Le profit est un des éléments du processus de valorisation des entreprises ce qui permet à la fois de financer le développement des entreprises, d’organiser des fusions, des acquisitions et de rémunérer les investisseurs.

Le profit est donc :

Ø      un indicateur de bonne santé de l’entreprise
Ø      la base de la rémunération de ceux qui prennent le risque d’investir,
Ø      une source de financement pour les entreprises

Le profit obéît à des considérations de court terme tant par sa structure que par les objectifs qui lui sont assignés.

L’existence en 2011 de profit est une bonne nouvelle ; son excès dans certains peut être la preuve de dysfonctionnements de l’économie de marché.

Contrairement aux enseignements de l’économie classique ou marxiste, le profit n’a pas disparu.

Le profit a bénéficié :

Ø      Du maintien d’un fort courant d’innovations (produits, commercial…)
Ø      De la concentration des entreprises et de la formation d’oligopoles (rentes de situation). Dans ce cas, le profit est un prélèvement injustifié sur les clients, les prestataires et les salariés
Ø      De gains de productivité
Ø      De la nécessité de rémunérer les apporteurs de capitaux

Il y a une idée largement répandue en vertu de laquelle les profits auraient explosé ces dernières années.

La concentration des entreprises qui s’accompagne d’une mondialisation pour les plus grandes d’entre-elles a abouti, ces dernières années, à une croissance des bénéfices (à relativiser au regard des chiffres d’affaires).

L’étude sur la répartition de la valeur ajoutée réalisée par l’INSEE en 2009 n’a pas démontré de fortes évolutions sur ces dernières décennies.

Seules 16 % des PME, en France, versent des dividendes. Pour les grandes entreprises, les dividendes distribués représentent, en moyenne, 4,7 % de la valeur ajoutée. Pour un quart d’entre-elles, cette proportion dépasse 7 %.

La répartition de la valeur ajoutée selon le rapport « partage de la valeur ajoutée, partage des profits et écarts de rémunération en France » rédigé par Jean-Philippe Cotis (directeur général de l’INSEE) » est resté globalement stable. En revanche, ce rapport souligne que, depuis 20 ans, le pouvoir d’achat des Français progresse lentement du fait du faible taux de croissance. Par ailleurs, ces dernières années, la répartition des profits s’est effectuée à l’avantage des dividendes et au détriment de l’autofinancement.

La rémunération des salariés a été marquée par une progression plus rapide pour les 10 % les moins bien payés et une progression importante pour les 1 % et surtout pour les 1 pour mille. La dernière étude de l’OCDE publiée au mois de décembre 2011 sur les inégalités de revenus confirme les résultats de l’INSEE.

Les dividendes versés sont-ils moins éthiques que les bénéfices réinvestis ? Une entreprise repose sur des fonds propres dont une partie résulte de l’avance que font des investisseurs (des épargnants ou des collecteurs d’épargne) auprès de l’entreprise. Tout comme un détenteur du Livret A est rémunéré pour l’argent qu’il laisse en dépôt, un actionnaire est en droit d’obtenir une rémunération en contrepartie de l’argent qu’il a investi. Certains considèrent que l’actionnaire bénéficie tout à la fois des dividendes et de la plus-value en cas de revente des actions. Premièrement, l’un et l’autre ne sont pas automatiques. Les actions ne rapportent que par l’existence de l’un et de l‘autre. Par ailleurs, les hérauts de l’anti-spéculation devraient considérer que le meilleur moyen de lutter contre les allers-retours spéculatifs est justement d’offrir des dividendes.

En période de crise, l’actionnaire doit participer à l’effort collectif. Il le fait à travers le paiement des impôts et taxes. En revanche si l’entreprise dans laquelle il a investi obtient de bons résultats, il n’a pas lieu d’être pénalisé. Bien évidemment, certaines entreprises peuvent chercher à maximiser leurs profits afin de distribuer des dividendes au détriment du futur et des salariés. Il convient que des contre-pouvoirs puissent s’exprimer pour empêcher ce type de dérives. La préférence pour le court terme pénalise in fine l’actionnaire.

En cas de difficulté, une entreprise peut avoir besoin de se renforcer et d’accroître ses fonds propres en cherchant de nouveaux actionnaires ou en demandant aux actuels de faire un nouvel effort. Il n’est pas inconvenant qu’ils puissent avoir une garantie sur la rémunération de leur apport.

Faut-il interdire toute distribution de dividendes en période de crise ? Dans ce cas, faut-il supprimer le versement des intérêts du Livret A car l’Etat est en déficit…

Les marchés financiers étant accusés de tous les maux, il n’y a qu’à les supprimer. Plus de bourses, plus d’agences de notation, plus de spéculateurs, plus de problèmes ? Toute l’épargne terminerait dans le Livret A et dans les obligations d’Etat. En ces temps de crise des dettes publiques, je ne suis pas convaincu que ce soit le meilleur placement. A force de diaboliser le marché, nous ne savons plus qui se cache derrière ces quelques lettres. Le marché, c’est nous tous. Plus de 90 % des Français sont des épargnants, un ménage sur deux a un contrat d’assurance-vie. A travers nos placements, nous participons au marché. Les assureurs, les banques, les fonds de pension (pour les actifs de nombreux pays) sont les acteurs des marchés. En règle générale, nous souhaitons que notre épargne nous rapporte. Je connais peu d’épargnants qui demandent à leur assureur ou à leur banquier d’avoir un rendement éthique ou limité au taux de croissance de l’économie.

En supprimant le bénéfice, les dividendes et le marché, la question serait de savoir qui finance l’économie, qui permet aux entreprises de se créer ou de se développer ? L’Etat pourrait se substituer aux apporteurs de capitaux. Cette expérience a été tenté en URSS avec le succès que nous connaissons et également à moindre échelle en France avec les nationalisations de 1944/1945 et de 1981. L’Etat actionnaire n’a pas été économe des impôts des Français et ses performances en la matière sont à prouver.

Certains rêvent de l’économie sociale comme planche de salut avec des sociétaires militants. Si ce type d’organisation peut convenir à des activités de services avec d’importants flux comme c’est le cas dans le domaine de la prévoyance, il est plus difficile d’usage pour des activités avec des retours sur investissement longs et exigeant d’importants capitaux. Le recours au crédit pourrait se substituer au financement par actions. La crise financière qui est avant tout une crise de l’endettement réduit les possibilités. Par ailleurs, une des faiblesses de l’économie française, c’est justement sa forte dépendance aux crédits et la faiblesse du financement par le marché actions.

La crise que nous connaissons est de la faute des banques ; il est donc logique qu’elles en paient les conséquences. Pourquoi pas les fermer ?

La faillite de Lehman Brothers a prouvé qu’une banque pouvait entraîner par effet domino l’ensemble du système. Le système bancaire et plus globalement financier repose sur la confiance ; sa disparition génère une onde de choc qui frappe toutes les institutions et qui est très difficile à arrêter. L’interconnexion est la règle dans le système bancaire. Quand vous retirer de l’argent dans un distributeur, vous vous ne inquiétez pas de savoir si ce dernier appartient ou non à votre banque. En retirant 50 euros sur un distributeur d’une autre banque que la vôtre, vous devenez un acteur du marché interbancaire. Tous les échanges commerciaux ont des traductions financières. Si la méfiance s’instaure, tout le système économique se bloque.

La crise est de l’unique responsabilité des banques. Pas si simple car la dérégulation instituée dans les années 80 a été initiée par les pouvoirs publics afin de financer à moindres coûts les déficits publics. Le développement des technologies de l’information et le maintien de taux d’intérêt bas après l’éclatement de la bulle Internet et après le 11 septembre ont favorisé la croissance du crédit immobilier aux Etats-Unis et en Espagne et plus globalement de l’endettement des acteurs privés et publics.

Les banques sont coupables d’avoir prêté à des ménages insolvables ? Sans nul doute que l’appréciation du risque a été mauvaise. De même que le processus de titrisation a accéléré l’endettement. Il est à noter que les Etats et de ce fait les gouvernements n’ont pas été plus clairvoyants en recourant à l’emprunt sans se préoccuper du remboursement et de la charge qui sera supportée par les prochaines générations.

Ce sont aux pouvoirs publics à fixer les règles, à définir les limites du jeu mais comme ils sont devenus les principaux acteurs, il est devenu au fil du temps de plus en plus difficile de réguler. La prostitution tant qu’elle n’est pas interdite est légale ; il en est de même en matière de prêt. Les autorités américaines auraient du veiller à ce que le taux d’endettement des accédants à la propriété n’excède pas un certain pourcentage des revenus mais à l’époque tout le monde se réjouissait de la santé économique américaine.

Pas d’économie sans crédit et sans assurance, telle est la règle en vigueur des phéniciens à aujourd’hui en passant par les commerçants génois ou hollandais. La croissance se nourrit de l’effet de levier et de la délimitation du risque. Il faut souligner que si les bateaux et les marchandises ont fait l’objet des premières couvertures assurantielles en relation avec des pratiques d’avance ou de crédit (crédit fournisseur), l’assurance touche aujourd’hui tous l’aspect de la vie quotidienne ; les actifs bénéficient d’une couverture sociale qui représente la couverture financière appliquée aux biens.

La menace qui pèse sur la sphère financière met à l’épreuve les deux piliers de notre société dont la pente naturelle est à la socialisation, à la mutualisation croissante des risques. Cette socialisation s’accompagne d’un phénomène pervers qui est la déresponsabilisation. Face à un échouage injustifié d’un navire sur les côtes bretonnes, le premier réflexe des habitants est de manifester contre le comportement des armateurs et de l’Etat et non de participer au nettoyage de la plage. Cette déresponsabilisation au nom de la socialisation est dans les faits une nouvelle forme d’individualisme qui justement sape l’indispensable confiance sur laquelle repose le système économique et social. .

« L’enfer, c’est l’autre » ou comment le protectionnisme redevient une valeur porteuse

Acheter ou produire français est devenu un thème à la mode en 2011. Les Français n’ont jamais été des grands défenseurs du libre échange. Il y a à la fois la tradition agricole et un complexe face aux autres pays industriels, l’Angleterre puis l’Allemagne. Au 19ème siècle, il a fallu toute l’énergie de Napoléon III pour instaurer endiguer la tentation protectionniste avec à la clef une rapide expansion économique. La France a tourné le dos aux droits de douane après la Seconde guerre mondiale avec son adhésion au GATT (transformé en OMC) et surtout à la CEE (devenue Union européenne). Comme sous Napoléon III, la France a, de la construction européenne, tiré un large profit de son ouverture extérieure.

De nombreux contresens sont énoncés au sujet du commerce extérieur. La France est aujourd’hui moins ouverte sur l’extérieur que l’Allemagne et en ne prenant pas en compte les échanges au sein de la zone euro, elle est moins ouverte que les Etats-Unis ou le Japon. Les échanges extérieurs représentaient, en 2010, 73 % du PIB en Allemagne contre 42 % en France.

La France souffre non pas d’un excès de mondialisation mais au contraire d’une trop faible intégration dans l’économie mondiale. L’Allemagne importe 45 % de plus de biens intermédiaires que la France. Elle importe des biens sophistiqués fabriqués  notamment dans les pays d’Europe centrale et orientale ainsi qu’en France. Elle joue à plein la théorie des avantages compétitifs à la différence de la France qui externalise des fabrications à faible valeur ajoutée. La part des importations issue des pays à bas salaires progresse plus vite en Allemagne que chez ses partenaires : +12 % de 1994/2006

Au total, l’Allemagne importe 73 % de plus que la France, avant la crise, le taux de croissance des importations allemandes n’était supplanté que par celui de l’Espagne

Les entreprises françaises ont choisi de délocaliser l’ensemble des structures de production quand celles d’Allemagne ont opté pour l’externationalisation des biens intermédiaires.

Les excédents allemands se sont nourris certes d’une maîtrise des coûts salariaux mais qui demeurent voisins de ceux de la France mais aussi du maintien d’un fort niveau d’investissement et de marges des entreprises.

Produire ou acheter français ne signifie plus grand-chose quand toute production est avant un puzzle. 50 % de la valeur ajoutée d’un Airbus dépend de sous-traitants extérieur à la zone euro ; 40 % de la valeur ajoutée d’un Boeing Dreamliner dépend de sous-traitants extérieurs aux USA. Pour un I Phone fabriqué en Chine et exporté  à partir de ce pays pour un montant global de 179 dollars, la valeur de l’assemblage effectué par la Chine est de 6,50 dollars soit moins de 4 % du total. L’apport du Japon est de 34 %, celle de l’Allemagne 17 %, celle de la Corée 13 % et celle les Etats-Unis 6 %.

La théorie des avantages comparatifs descend au niveau de chacun des éléments d’un produit en intégrant les dépenses de recherche, de conception et de marketing. Les produits n’ont plus de nationalité. Ils en ont plusieurs.

La Chine a connu le déclin autour du 16ème siècle par refus de commercer avec les barbares. Aucun pays ne peut asseoir son développement en récusant le commerce. Mettre en avant des barrières au nom du développement durable, au niveau de la protection des salariés est louable mais il n’est pas certain que ce soit les véritables motivations et qu’en outre cela améliore l’état réel des conditions de vie des populations concernées. L’ingérence économique se fait par les échanges. Il faut des règles qui sont de la responsabilité de l’OMC.

Le décollage économique de la moitié de la planète est une chance sans précédent tant en matière de condition de vie pour les populations concernées qu’en termes de recherche, d’innovations, de création de richesse. Le nombre de chercheurs qui stagnent en occident explose en Asie. Il faut s’attendre avec la mise en réseaux des centres de recherche à des découvertes dans les prochaines années. Evidemment, cela remet en cause l’occident-centrisme. Bizarrement nombreux parmi ceux qui prônent un monde multipolaire, sans frontière qui réclament d’édifier de nouvelles murailles de Chine.

En matière de commerce extérieur, les échanges sont d’autant plus productifs qu’ils sont réalisés avec des pays voisins en termes de développement économique. Nous avons donc intérêt au rattrapage du retard économique par les pays émergents.

Les partisans de l’abandon sont de plus en plus nombreux. La condamnation du profit, de la productivité, de la concurrence est sous-tendue par l’illusion de revenir à un état de nature rousseauiste. Cette tentation très française et à la limite européenne est à la fois un luxe, une illusion et une escroquerie. Un luxe car elle n’est possible car nous avons atteint un niveau élevé de développement économique, une illusion car hier, avant-hier n’étaient pas mieux qu’aujourd’hui sur le plan des conditions de vie, de la santé et du travail (pénibilité, mine, travail à la chaine), escroquerie car il n’y a pas d’état immobile en économie ; l’économie est mouvement. Il n’y a pas de possibilité de dire stop car elle est comme la vie.

vendredi 16 décembre 2011

La perte du triple A : quelles conséquences, quelles solutions ?


Seuls 15 pays  avaient jusqu’au 16 décembre 2011 préservé un rating AAA

q      Singapour (ratio dette publique sur PIB à 112% en 2010)
q      Canada (84%)
q      Allemagne (83%)
q      France (82%)
q      Royaume Uni (80%) 
q      Autriche (72%)
q      Pays-Bas (63%)
q      Finlande (48%
q      Norvège (45%),
q     Danemark (44%),
q     Suisse (40%),
q     Suède (40%),
q     Nouvelle Zélande (39%),
q     Luxembourg (18%)
q     Australie (14%)

Les agences de notation retiennent de nombreux indicateurs afin de noter les emprunteurs et en particulier les Etats : données économiques, données liées aux finances publiques, données liées à la gouvernance…

L’impact de la perte du triple A est d’ordre psychologique, économique et financier. Il a déjà été fortement intégré par les acteurs internationaux.

La question est aujourd’hui plus de sortir de la crise que de s’épancher sur la perte du triple A. Il est à regretter que l’Europe n’est pas une vision à moyen terme de l’économie et les moyens de soutenir des Etats en difficulté.

I.                    Quels sont les critères retenus par les agences de notation ?

Les agences de notation ont recours à de nombreux critères économiques, sociaux et de gouvernance pour établir leur classement. Ces critères donnent lieu à une pondération en fonction du degré d’importance qui leur est octroyé.

  1. la dette publique

Le niveau de la dette et son évolution passée et à venir sont pris en compte. Le fait pour la France de se rapprocher des 90 % de PIB constitue un signe de faiblesse évident. Le ratio de 60 %marque le passage d’une dette facilement réversible à une dette qui peut s’emballer et soumis à l’aléa de la croissance. Au-delà de 90 %, la dette obère les capacités de croissance de l’Etat en question.

Les agences ne prennent pas exclusivement le niveau total de la dette mais également le poids annuel de la dette qui prend en compte la dette venant à maturité et déficit budgétaire de l’année. Ce critère permet de mesurer le besoin de financement réel du pays. Ce poids réel est ainsi de 50 % du PIB au Japon, 25 % aux Etats-Unis et en Grèce, 23 % en Italie, 20 % en France, 16 % au canada, 10 % en Allemagne et 3 % en Australie.

La dette est également appréciée en fonction des revenus de l’Etat. Ainsi, le stock de dette représente 2 ans de revenus en France comme en Allemagne, 3 en Italie, 3,5 aux Etats-Unis, 5 en Grèce et 7 au Japon.

Les agences mesurent également les efforts à mener pour réduire le stock de dette.

Ainsi, pour revenir en 10 ans à un niveau de 60 % de dette publique, le surplus primaire (déficit-service de la dette) devrait atteindre 13 % au Japon, 11,5 % aux Etats-Unis, 8 % pour l’Espagne, 6 % pour la France et 2 % pour l’Allemagne.

Son solde primaire est négatif de 3 % soit plus que l’Italie, le Portugal et l’Allemagne.

Le surplus le plus important est celui de la Norvège avec de 6 %.

  
  1. les critères de finances publiques

Les agences prennent en compte la capacité des Etats à réduire leur déficit et à maîtriser leurs dépenses publiques. La France qui est en déficit depuis 1973 et dont les dépenses publiques ont une propension à la hausse est à ce titre mal notée.

Le niveau de dépenses publiques et de prélèvements obligatoires est également intégré.

Les agences de notation prennent en compte la capacité des Etats à lever des impôts et à récupérer effectivement les recettes.

La France est pénalisée par son haut niveau de prélèvements obligatoires mais son administration fiscale et sociale est réputée pour son efficience.

Les agences prennent en compte l’évolution de la population et des charges à venir, en particulier en matière de retraite.

  1. les critères de croissance
La croissance permet tout à la fois de réduire ou de maîtriser les dépenses publiques et d’augmenter les recettes publiques. Une faible croissance rend plus difficile le retour à l’équilibre. Les agences étudient tout à la fois la croissance en temps « t » mais aussi la croissance potentielle. Or, la France enregistre une diminution de sa croissance potentielle avec une contraction de ses gains de productivité. Les prévisions de récession pour 2011/2012 ne font qu’accentuer cette situation.

Le plan de restauration des équilibres publics tablaient sur une croissance de moyenne période de 2 %. Or, depuis 2008, la croissance de moyenne période est tombée à 1.

Un point de croissance de moins représente une perte pour les finances publiques de 10 milliards d’euros.

L’INSEE vient de souligner que la France pourrait être en récession fin 2011 et début 2012. La prévision du Gouvernement d’un taux de croissance de 1 % en 2012 apparaît en l’état difficile voire impossible à réaliser.

La croissance française est impactée par trois éléments :

Ø      La crise financière avec à la clef le resserrement de l’accès au crédit
Ø      Les plans d’assainissement des comptes publics qui créent un choc récessionniste
Ø      L’incertitude qui incite les acteurs économiques à reporter leurs décisions

  1. la situation de la balance courante

Un déficit signifie la nécessité d’attirer des capitaux étrangers et de vendre des actifs.

La balance commerciale française est depuis 2003 déficitaire. La balance des paiements courants qui intègrent les services est déficitaire de 1,7 % du PIB.

  1. le taux d’épargne et d’endettement des autres acteurs

Les pays à fort taux d’épargne peuvent accumuler de la dette comme le prouve le Japon.

Une dette détenue par les résidents est moins sensible aux aléas du marché. En revanche, l’épargne ainsi utilisée ne finance pas les entreprises ce qui fragilise la croissance. 70 % de la dette publique française est détenue par des non-résidents contre 6 % au Japon ou 52 % aux Etats-Unis.

Des ménages faiblement endettés et épargnants est un élément pris en compte mais ne constitue pas un remède sur le long terme.

Le taux d’épargne des Français est de 16 % du revenu disponible brut avec un taux d’endettement qui tout en progressant reste mesuré.


  1. la gouvernance

Un Etat solide avec un pouvoir stable reposant sur un large consensus a plus de chances d’avoir une politique budgétaire saine qu’un Etat faible.

Les divisions entre Républicains et Démocrates ainsi qu’au sein de l’Union européenne jouent contre les Etats-Unis et les Etats membres de la zone euro.

La France possède d’un Etat bien administré mais reposant sur un faible consensus social et avec en perspective des élections. La capacité à réformer est également un facteur à analyser.


II.                  LES CONSEQUENCES DE LA PERTE DU TRIPLE A POUR LA France ?

  1. une image dégradée

La perte du triple A constitue une dégradation de l’image d’un pays et a un impact psychologique qui peut être plus important que l’effet réel (surtout quand cette perte est prévue de longue date comme ce fut le cas pour les Etats-Unis).

La France sort du club fermé des pays les plus solides de la communauté internationale. Les Etats-Unis l’ont précédé mais à la différence de ce pays, la France ne dispose pas de la première monnaie internationale.

Une fois perdu, un triple A nécessite du temps pour être recouvré.

  1. une augmentation relative des taux d’intérêt pour l’Etat

Les agences par leur système de notation visent à faciliter le travail des investisseurs en classant les emprunteurs en fonction de la qualité de leur signature.

La perte du triple A signifie une dégradation de la signature de la France avec par voie de conséquence une augmentation de la prime de risque demandée. L’Etat devra emprunter avec un taux un peu plus élevé mais cette hausse restera mesurée.

L’écart de taux avec l’Allemagne qui est d’un point traduit déjà la perte du triple A. Compte tenu de la politique mise en œuvre et des fondamentaux de l’économie française, il y a peu de risque que les spreads s’envolent après la dégradation de la note française.

  1. des conséquences pour l’ensemble de l’économie

Les banques et les compagnies d’assurances ont déjà enregistré une dégradation de leur notation. En règle générale, quand les Etats sont dégradés, les institutions financières le sont aussi avec comme principe qu’une banque ou une compagnie d’assurance ne peut pas avoir une note supérieure à celle de son Etat de référence.

Les institutions financières comme pour les Etats devront emprunter à un taux plus élevé et veiller à leur solvabilité.

Pour les autres acteurs économiques, il peut en résulter un accès plus difficile pour accéder au crédit. Il faut souligner que cette problématique est de toute façon présente depuis plusieurs mois.

La perte du triple A est une pression sur l’Etat afin d’accomplir des efforts pour assainir les comptes publics. Il en résultera de nouvelles hausses pour les prélèvements obligatoires et la nécessité de réduire les dépenses publiques ou du moins de les maîtriser.

Pour les épargnants, il y a un aspect négatif en termes de perspectives économiques et fiscales. Il y a, en revanche, la possibilité de rendements plus importants en matière de placements à taux fixes (obligations, fonds euros de l’assurance-vie…). Le marché « actions » dépendra des projections de croissance et de la capacité des entreprises à résister à la crise.


Conclusion : pour un programme européen d’investissements

Le point clef pour sortir du cyclone de la crise et de la perte du Triple A est la croissance. Les Européens qui ont du mal à s’entendre sur la résorption de la crise grecque ont encore plus de difficulté un bâtir un plan commun de sortie de crise.

La création d’eurobonds semble reportée sine die.

Elle pose une série de problèmes :

Ø      Quelle autorité serait compétente pour attribuer des quotas d’émissions et selon quelles conditions ?
Ø      Ces eurobonds permettrait-il de racheter de la dette sur le marché secondaire avec de ce fait une prime au mauvais gestionnaire ?
Ø      Quelles seraient les contreparties, pouvoir de contrôle, et avec quels transferts de pouvoirs budgétaires et fiscaux ?

Les Etats les plus vertueux seraient amenés à garantir les plus laxistes avec comme conséquence un surcoût pour les premiers.

La logique serait de doter la zone euro de fonds d’actions conjoncturelles et structurelles pour faire face à des chocs asymétriques.

Le budget européen représente 1 % du PIB et est affecté à 45 % au budget agricole. Les sommes disponibles pour endiguer une crise sont quasi inexistantes. Il conviendrait comme cela existe aux Etats-Unis pouvoir mobiliser des fonds afin de réaliser des dépenses structurantes au profit d’Etats en difficulté.

L’Europe est confrontée à un sous-investissement. Il serait judicieux pour soutenir l’activité que l’échelon européen puisse financer des dépenses d’investissement dans l’énergie renouvelable, dans les transports, dans la recherche, dans la protection de l’environnement, dépenses qui seraient réalisées dans les Etats en difficulté en priorité. Ces dépenses profiteraient aux entreprises de l’ensemble de la zone et en premier à celles de l’Allemagne.

Ces dépenses pourraient être financées par l’Union ou la Zone euro à travers l’émission d’emprunts dont les taux seraient faibles du fait de la mutualisation.

vendredi 9 décembre 2011

L'Afrique, la nouvelle terre promise de l'économie ?

L'Asie, c'est fini... pas encore mais il est certain que la Chine doit faire face à une augmentation de ses coûts sociaux et doit gérer sa dette interne peu transparente. la Chine peut devenir vieille avant d'être riche du fait sa structure démographique. L'Inde qui sera la première puissance démographique en 2030 doit surmonter ses problèmes sociaux. De ce fait, l'Afrique qui aujourd'hui décolle économiquement pourrai être le continent des trente prochaines années. Disposant de réserves de matières premières et d'énergie, ayant une population jeune qui accèdent à des niveaux de formation de plus en plus élevée, certains pays d'Afrique font mieux que la Chine ou l'Inde en termes de croissance. Arrivent en tête le Ghana, l'Ethiopie. Il faut également citer le Congo, le Botswana, le Zimbabwe, le Nigéria, la Zambie, le Mozambique ou la Tanzanie. Une dizaine d'Etats sur les 54 que compte l'Afrique sont entrés dans un processus de développement économique prometteur. La Chine a compris tout le potentiel de l'Afrique comme les Etats-Unis. Les Etats d'Europe englués dans leurs problèmes et n'ayant pas su moderniser le cadre de leurs relations avec les Etats africains sont en perte de terrain. Certaines sociétés comme Total ou Bolloré conservent une forte influence politique. Dans le cadre de la mondialisation de l'économie, le continent africain longtemps délaissé par les investisseurs risquent d'être un vecteur de croissance pour de nombreuses années.

lundi 5 décembre 2011

Euro-fiction ou pourquoi je suis contre ce scénario et le fanatisme de la catastrophe

La tentation du retour au bon vieux franc hante certains esprits. Certes, il faut l’avouer il est possible de démonter ce qui a été élaboré depuis des dizaines d’années. Pour s’en convaincre, il suffit de constater que l’histoire est pavée d’unions monétaires qui se sont évaporées, union monétaire latine, union monétaire austro-allemande, union monétaire scandinave. La question n’est donc pas « est-il possible ou pas de sortir de l’euro ? » mais quelles conséquences pour les Français aurait l’éclatement de l’euro ?

Que signifierait la fin de l’euro ?

L’éclatement de la zone euro pourrait prendre plusieurs formes. La sortie d’un ou plusieurs pays ou le retour à la situation de 1999.
Il pourrait se recréer de petites zones. Les Pays-Bas, le Luxembourg, la Suède, l’Autriche pourraient rester associés. La France pourrait également chercher des alliés.
L’autre solution serait le délestage dangereux d’un ou plusieurs pays avec un risque de jeu de domino. Le départ de la Grèce risquerait d’être suivi par le Portugal, l’Espagne, l’Italie et ainsi de suite.

Pas obligatoirement de conversion !

La fin de l’euro se manifesterait par la circulation de plusieurs monnaies au sein de l’ancienne zone euro et du retour des taux de change. Il n’y aurait pas obligatoirement une opération de conversion telle que nous l’avons connue en 1999. Il est peu probable que nous revenions à la parité du franc de 1999 en divisant par 6,55957. Ce taux de conversion correspondait à la situation de 1999 et en aucun à celle de 2011. A l’époque, il fallait fusionner et opter pour un étalon commun aux pays membres de la zone euro.

De nouveaux billets et de nouvelles pièces ?

Même si l’on conservait l’unité de compte actuellement en vigueur, il serait néanmoins nécessaire de réimprimer des billets et des pièces couvrant la France ou les pays qui choisiraient de s’arrimer à nous. Le nom de la monnaie pourrait être l’euro sauf si l’Allemagne demandait à le conserver pour sa propre zone ; il pourrait s’agir de « l’eurofranc » ou du « nouveau, nouveau franc ».

Quel taux de change ?

Le taux de change serait celui du marché. Il s’établirait en fonction des parités de pouvoir d’achat. Il y aurait la prise en compte des variations des coûts de production au sein de l’ancienne zone euro, des déficits commerciaux et aussi de la situation économique et financière du ou des pays concernés.

En l’état actuel, la France subirait une dépréciation de 20 à 30 % hors effet spéculatif par rapport à l’Allemagne. Mais, la situation serait très instable du fait de l’impact économique et financier lié à l’éclatement de l’euro. L’incapacité de rembourser les dettes, les menaces sur le système financier pourraient faire plonger la monnaie avec une dépréciation sans rappel de plus de 50 % voire plus.

Les conséquences macro-économiques

L’éclatement de l’euro ne pourrait se faire que dans le cadre d’un vaste plan négocié afin d’éviter une banqueroute généralisée privée comme publique.

Eviter la banqueroute par tous les moyens

La sortie de l’euro poserait la question de la gestion des dettes publiques. Les dettes publiques sont fortement internationalisées. La dette française est possédée à 70 % par des non-résidents. En cas d’éclatement de la zone euro, la dette sera-t-elle exprimée dans la nouvelle monnaie ou dans celle de l’Etat à monnaie forte ? Dans ce dernier cas, la dette sera majorée par le taux de déprécation monétaire avec un risque non négligeable d’insolvabilité. Dans le premier cas, les créanciers perdraient une partie de leurs avoirs avec comme conséquence un refus de prêter à nouveau ce qui entraînerait également un problème de liquidités.
La capacité d’emprunt des Etats sortants serait très diminuée voire nulle sans intervention de la communauté internationale. L’augmentation des taux d’intérêt rendrait très coûteux l’endettement.
La sortie de l’euro serait accompagnée par la mise en place de plans de rigueur et de plans d’appui du FMI pour éviter une trop forte dépréciation et un cercle vicieux dépréciation/récession. Elle obligerait à prendre des mesures très fortes pour tenter d’entraver la spéculation à la baisse. Le retour d’un contrôle des changes serait inévitable.

Eviter l’inflation

Quand les monnaies nationales existaient dans le cadre du Système monétaire européen, chaque dévaluation donnait lieu à la mise en place de plans de rigueur pour limiter les effets inflationnistes et améliorer la compétitivité de l’économie. Ce fut le cas en 1983 avec l’application de la politique de désinflation compétitive par Pierre Bérégovoy.

La dépréciation entraînerait l’augmentation des prix des produits importés or la France est fortement dépendante de l’extérieur pour l’énergie et pour de nombreux biens industriels. Cette augmentation des produits importés diminuerait le pouvoir d’achat des Français et grèverait les coûts des entreprises.

L’Etat serait contraint de prendre des mesures pour entraver la dérive inflationniste, mesures qui pourraient prendre la forme d’un gel des prix et des salaires.

Quel impact pour le commerce extérieur ?

La France est déficitaire depuis 7 ans. Retrouverait-elle un excédent avec le changement de monnaie ?

Le premier effet de la dépréciation serait une détérioration des termes de l’échange. Les biens français vendus à l’étranger perdraient en valeur quand les prix des produits importés augmenteraient. Il en résulterait une aggravation du déficit commercial. Si grâce à la diminution des prix et à la capacité de l’appareil de production de répondre à la demande (si elle existe), les exportations pourraient progresser plus rapidement (courbe en J liée à la dévaluation). Il n’en demeure pas moins qu’il faut prendre en compte les surcoûts liés à l’inflation importée et le fait que le facteur prix n’est pas le seul élément pris en compte dans es échanges internationaux. L’Allemagne réussit à dégager des excédents de 150 milliards d’euros en jouant bénéficiant des gains liés à l’appréciation monétaire.

Quelles conséquences pour les particuliers ?

Au moment de la chute de la zone euro, les particuliers ne ressentiraient que l’angoisse du précipice, du vide. Ce n’est que dans un second temps que le réveil pourrait être plus difficile.
Pour les salaires, un encadrement serait institué avec à la clef une perte de pouvoir d’achat. Les vacances à l’étranger coûteraient plus chères avec, en outre, un possible retour du contrôle des changes.
Afin de rassurer les créanciers et éviter une dépréciation sans fin de la monnaie, des plans d’assainissement avec augmentation des impôts devront être adoptés.
L’augmentation des taux d’intérêt freinerait la capacité d’emprunt des ménages.
La dépréciation des monnaies en renchérissant les produits importés (non substituables pour un grand nombre) pèserait sur les dépenses de consommation.
Pour l’épargne, la situation serait fonction des mesures prises par les pouvoirs publics et de la capacité des Etats à rembourser leurs créances. L’intervention du FMI avec des plans de rigueur à la clef est fort probable avec un objectif, éviter l’implosion de la sphère financière.
Le patrimoine immobilier pourrait être impacté du fait des difficultés à accéder au crédit. Il y aurait un premier effet « valeur refuge » avec des sorties au sein des placements financiers puis un second effet « baisse des prix » du fait des conditions de crédit. Néanmoins, les étrangers auraient une capacité d’achat accrue du fait de la dépréciation monétaire.

Quel impact pour les entreprises ?

Moins d’investissement, risques de contrôle des prix et des salaires, augmentation des charges, la sortie de l’euro auraient plus d’inconvénients que d’avantages.
Les entreprises intervenant sur le marché international subiraient une dégradation des termes de l’échange avec l’espoir de pouvoir vendre plus.
L’accès au crédit serait encore plus difficile.
Les actifs détenus à l’étranger seraient en revanche revalorisés en fonction de la dépréciation.
Pour les entreprises étrangères, les actifs français seraient dépréciés.

Quel impact pour la croissance ?

La sortie de l’euro aurait un impact psychologique important. Les investisseurs se détourneraient de la France. Un attentisme généralisé est à craindre. Par ailleurs, la dépréciation monétaire provoquerait une perte de valeurs pour tous les acteurs et en premier lieu pour les institutions financières.

Le financement de l’économie serait complètement administré. Des mesures au niveau mondial devraient être instituées afin d’éviter une implosion de la sphère financière qui devrait encaisser d’importantes moins-values.

La sortie de l’euro devrait pour plusieurs années se traduire par moins de croissance. L’impact dépendrait des plans mis en œuvre par le FMI, l’Union européenne.

La croissance serait freinée par le recul de l’investissement (incertitudes, augmentation des taux d’intérêt) et par la consommation (augmentation des prix des produits importés et gel du pouvoir d’achat).

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Les scénarii de sortie de l’euro sont délicats à réaliser car ils dépendent des modalités de sortie. Un éclatement incontrôlé mènerait inévitablement à la catastrophe économique et financière. Une sortie organisée signifierait sans nul doute la mise sous tutelle des Etats concernés par le FMI avec des mesures d’accompagnement pour éviter l’implosion financière. En cas d’éclatement incontrôlé, les tentations protectionnistes et les pratiques non coopératives pourraient provoquer une série de chocs. En revanche, en cas de politiques concertées et de réintroduction d’un système monétaire européen, l’impact sans être nul pourrait être lissé dans le temps.

Il faut prendre en compte les effets cumulatifs de la sortie de l’euro avec interdépendance des facteurs. Les curseurs qui joueraient contre la croissance en France comme dans les autres pays seraient nombreux. L’Allemagne serait la première victime en raison de sa dépendance au commerce extérieur. La destruction de la zone euro la priverait de son premier marché, l’Europe. Il en est de même pour la Chine. La France premier fournisseur et client de l’Allemagne serait impactée par les difficultés de son voisin et inversement. Le risque de l’enclenchement d’une spirale non maîtrisée n’est pas nul. De toute façon, la sortie de l’euro entrainerait un appauvrissement de la France. Pour ces différentes raisons, il est important de sauver la monnaie commune.

vendredi 2 décembre 2011

La longue marche vers le fédéralisme monétaire


L'euro n'est pas encore doté d'un gouvernement. Les pays membres de la zone euro sont réticents face aux transferts de souveraineté qui seraient nécessaire pour donner une tête à l'Union monétaire. Les Etats européens se sont construits de manière négative par la guerre les uns contre les autres et par le budget. Le contrôle du budget et des impôts est la base des Etats démocratiques modernes. Renoncer à l'indépendance budgétaire constitue un changement, une rupture que même la crise actuelle ne suffit pas à justifier.

La chancelière Angela Merkel a, dans son intervention du 2 décembre, souligné que le Parlement allemand n'avait pas vocation à perdre ses pouvoirs budgétaires. Elle a ainsi déclaré que "la Commission et les tribunaux européens doivent jouer un plus grand rôle, sans que le Parlement allemand ne perde la maîtrise du budget" La chancelière souhaite développer un contrôle juridictionnel et pouvoir traduire devant la Cour européenne de justice (CEJ) les pays qui enfreignent de manière répétée les règles du Pacte de stabilité.

En complément et en accord avec Nicolas Sarkozy, l'Allemagne est favorable à l'adoption au sein de la zone euro de la «règle d'or» qui s'accompagnerait au niveau européen de sanctions automatiques en cas de non respect des normes. La chancelière a également proposé la création d'un poste de Commissaire européen préposé au maintien de la stabilité de la monnaie. Ce commissaire aurait comme mission de veiller à la mise en œuvre de mesures d'austérité en cas d'aide financière accordée au niveau communautaire.

La chancelière n'a pas condamné les interventions de la BCE qui néanmoins selon elle n'a pas à jouer le même rôle que la Federal Reserve Bank (Fed) américaine. Elle a mentionné que la BCE pourra continuer de racheter des obligations de pays de l'eurozone surendettés sur le marché secondaire.

Le convergence franco-allemande s'effectue pas à pas. La chancelière ne souhaite pas signer de chèque en blanc. L'Allemagne qui a du gérer le départ des troupes soviétiques après 1991 en payant la Russie, qui a du gérer la réunification par d'importants transferts financiers ne souhaitent pas faire de même au profit des Etats d'Europe du sud.

L'Allemagne pose un principe clair, que les Etats endettés commencent à agir, l'Allemagne étudiera après et sur preuves si elle peut les aider. Elle veut éviter tout automatisme. Elle souhaite instituer un contrôle par la norme . La faiblesse du plan est l'absence de mesures de corrections en cas de choc asynchrone. La chancelière considère que les évolutions des Etats membres sont de la responsabilité des gouvernements des Etats membres.

jeudi 1 décembre 2011

La lettre du Cercle - mois de décembre 2011 N°65


Au sommaire de la lettre d'information N°65 du Cercle des Epargnants, mois de décembre
  • L'édito de Philippe Crevel : quand l'histoire joue avec les fantômes
  • Faut-il attendre 60 ans pour être riche ?
  • Mon fils, demain tu seras agriculteur
  • Pouvoir d'achat, fin de partie pour les retraités ?
  • Il n'y a pas que les Etats qui sont dans le rouge
Lire la lettre N°65 du Cercle - décembre 2011      
  • Comment les Français épargnent-ils en pleine crise ?
  • L'immobilier, chronique de l'éclatement d'une bulle toujours reporté
  • Espérance de vie, les hommes ont trente ans de retard sur les femmes
  • Actions, la France loin derrière les Anglo-Saxons