lundi 24 novembre 2008

Et si c'était le système monétaire qui était en cause

Les grandes crises économiques trouvent leur origine dans les dérèglements du système monétaire international. Ce fut le cas en 1929 mais aussi au 19ème siècle. Depuis 1971 et la fin de la convertibilité du dollar et l'institutionnalisation des changes flottants en 1976, les pouvoirs publics pensaient que le non système permettait de se prémunir des blocages inhérents à un système règlementé. Or, les motifs qui ont justifié d'abandonner le système des accords de Bretton Woods n'ont pas disparu avec les changes flottants. Simplement, le règne de l'étalon dollar a facilité le financement de l'économie américaine et de son déficit commercial exponentiel, plus de 700 milliards de dollars cette année, en ayant recours à l'épargne mondiale. Le non-système a tenu car les Etats-Unis en s'endettant continuaient tout à la fois à s'enrichir et à enrichir le monde. Les gains de croissance et le maintien de taux d'intérêt positif, d'autant plus que les subprimes les ont dopé, justifiaient le maintien d'un flux de capitaux en faveur des Etats-Unis.

L'enrayement du système par l'éclatement de la bulle immobilière a révélé la faillite du système monétaire.

Logiquement les taux de change permettent de corriger les divergences des économies réelles or tel n'est plus le cas du fait de la mondialisation et du non respect par certains pays des règles du marché.

Les pays émergents en liant leur monnaie à celle du dollar ont faussé le jeu. En effet, l'accumulation d'excédents commerciaux de la part de la Chine et des autres ateliers d'Asie aurait du aboutir à l'appréciation de leur monnaie. Or, ils ont laissé glissé leur monnaie au même rythme que le dollar empêchant tout rééquilibrage des échanges commerciaux.

Par ailleurs, les pays émergents n'appliquent pas la liberté de change et la libre circulation des capitaux.

La création de l'euro loin de stabiliser le système monétaire a contribué à le déstructurer.

En effet, l'arbitrage de taux d'intérêt de change et de taux d'intérêt permet dans un système financier ouvert vingt quatre heures sur vingt quatre de spéculer à loisir. Le Japon avec des taux d'intérêt faibles voire nuls incitent les investisseurs à emprunter dans ce pays puis à opérer des placements aux Etats-Unis ou en zone euro qui offrent de la sécurité et du rendement.

Les différences de taux d'intérêt entre monnaie doivent refléter tout à la fois les anticipations inflationnistes et de croissance or par définition, elles intègrent une part de psychologie non négligeable. L'Europe rentière se complait à pratiquer des taux élevés quand les Etats-Unis soucieux de l'emploi acceptent des taux plus faibles .

Depuis 1944 et surtout depuis 1971, nous vivons sur un système d'étalon dollar. Or avec l'euro, ce système est fragilisé. Or, les périodes de bi-étalons sont toujours des périodes de crise.

La question n'est pas aujourd'hui de savoir s'il faut relancer ou pas l'économie mais comment pouvons-nous organiser le système monétaire international. Il apparait indéniable que la libre circulation des capitaux doit s'imposer à tous les pays qui tirent profit du libre échange. Il convient certainement qu'une harmonisation des taux d'intérêt et des taux de change soit instituée; le système monétaire européen avec ses zones de fluctuations devrait être repris au niveau international. Le dollar, l'euro, le Yen, le Yuan et le Rouble devraient mieux refléter l'état réel des économies nationales.

mercredi 19 novembre 2008

L'illusion de la relance

2% du PIB consacrés à la relance. Les élus frétillent de joie en pensant pouvoir obtenir le financement de tous les travaux en instance. Des routes, des voies ferrées, de piscines, des stades pour sauver l'économie et tout cela financer par l'emprunt. Depuis le New Deal, le mythe des grands travaux hantent les décideurs politiques dès les premiers signes de récession. C'est oublié que ce n'est pas les grands programmes de Roosevelt qui ont sorti les Etats-Unis de la léthargie mais la guerre. C'est oublié que de la décision de lancer des grands travaux et leur réalisation, de nombreux mois peuvent s'écouler. Enquêtes, études d'impact, permis, recours, procès.... combien d'années faut-il avant de concrétiser un grand projet dans un pays comme la France qui s'amuse de se moquer du procédurisme américain tout en le singeant avec excellence. Il aura fallu près de dix ans au directeur de l'hôpital de Necker à Paris pour obtenir l'autorisation de reconstruire une partie de son établissement qui pourtant menace ruine. L'ancien hôpital Laennnec au cœur de Paris est une jachère depuis dix ans du fait de la contestation d'associations plus ou moins représentatives et des hésitations des pouvoirs publics. Au mieux, l'effet des grands travaux se fera sentir dans deux ou trois ans.
Pour relancer l'offre, un amortissement exceptionnel de 100 % aurait eu plus d'effet mais, en revanche cette mesure aurait amputé les recettes de l'Etat. On ne peut pas tout avoir l'efficacité et l'argent du beurre...

lundi 17 novembre 2008

G 20 en vain ?

G 20 en vain ?


Le sommet des chefs d’Etat des plus grandes puissances économiques est une idée française, celle de Valéry Giscard d’Estaing qui souhait, de manière informelle, établir un échange de vues afin de répondre à la crise pétrolière de 1973. Ainsi, à Rambouillet, les chefs d’Etat ou de Gouvernement des Etats-Unis, de l’Allemagne, du Royaume-Uni, du Japon et de la France se réunissent. EN 1976, l’Italie et le Canada intègreront ce club informel. Au-delà de la puissance économique, le G7 a pour caractéristique de rassembler des pays démocratiques. Après la chute de Berlin et de l’URSS, il s’est ouvert, avec difficulté, par ailleurs, à la Russie. L’émergence de nouvelles puissances économiques pose le problème de sa représentativité. La Chine est, en effet, plus puissant qu’un grand nombre des pays membres du G8.

Il faut souligner que les Démocraties ne mettent plus leurs idéaux en avant. La mondialisation et la crise ont eu pour conséquences d’imposer de fait une relativité des valeurs. Les pays autocratiques comme la Chine ou la Russie sont considérés comme des partenaires comme les autres ; tout comme les monarchies du Golfe. Le retour aux valeurs diplomatiques du XIXème siècle semble s’effectuer de manière implicite. Chacun est maître chez soi tout en appartenant à un large ensemble économique. La Tchétchénie ou la Géorgie ne sont plus au cœur de l’actualité tout comme la Mongolie. Les droits de l’homme dans les pays du Golfe n’intéressent personne. L’Occident est entrain d’abandonner ses valeurs messianiques afin de sauver son économie.

Le G 20 (Etats-Unis, Canada, Japon, Russie, Grande-Bretagne, France, Allemagne, Italie, l'Afrique du Sud, l'Arabie Saoudite, l'Argentine, l'Australie, le Brésil, la Chine, la Corée du Sud, l'Inde, l'Indonésie, le Mexique et la Turquie) du 14 et 15 novembre 2008 ne révolutionne pas le système économique. Tel n’était pas son objectif de toute façon. Les conclusions du sommet prévoient une plus grande coordination et une refonte à venir des instances de régulation. Ainsi, Les chefs d’Etat du G20 ont décidé de «prendre toutes les mesures supplémentaires nécessaires», pour assurer la liquidité des marchés et pour favoriser la consommation. Les Etats-Unis se sont opposés à tout interventionnisme du fait des engagements déjà pris et du montant de leur déficit budgétaire, 1.000 milliards de dollars (793,7 milliards d'euros) pour 2008. D'ici au 31 mars 2009 un «collège de superviseurs» comprenant tous les principaux régulateurs de la finance dans le monde sera mis en place. Les vingt pays ont également décidé de réguler plus fortement les produits financiers dérivés des crédits, et notamment des «credit default swaps» (CDS), des contrats d'assurance entre banques et entreprises contre le risque de défaut d'un tiers. Les responsables du G20 ont pris l’initiative de modifier la composition du Forum sur la stabilité financière rassemblant les représentants des gouvernements, des banques centrales et des agences de régulation de différents pays pour chercher des moyens d'améliorer la régulation financière, groupe créé à la suite de la crise de change asiatique de 1997-98. Dans le même esprit, il a été convenu de réformer le FMI. Ses pouvoirs et ses moyens seront accrus. Les vingt se sont engagés contre tout retour au protectionnisme et ont décidé de favoriser la conclusion d’un accord pour le cycle de Doha qui est depuis des mois en panne. Enfin, les dirigeants du G 20 doivent se réunir d'ici au 30 avril 2009.

Lire la déclaration officielle

mercredi 12 novembre 2008

Le faux débat de la retraite à 70 ans

Depuis deux semaines, les articles sur l'amendement visant à porter l'âge limite de mise à la retraite à 70 ans se multiplient. Ainsi, à travers cette disposition voudrait imposer aux Français de travailler jusqu'à 70 ans.

Ceux qui croient en cette sornette devraient remercier les parlementaires d'avoir retenu la limite de 70 ans car dans le texte initial, passé inaperçu, il n'y avait aucune limite. Ainsi, ce n'était pas 70 ans mais 80 voire 90 ans. C'est sous la pression du MEDEF et de l'AFEP, l'association française des entreprises privées, que les pouvoirs ont accepté de modifier leur copie.

Ce n'est pas mansuétude que les dirigeants d'entreprise ont fait pression mais pour éviter que des cadres décident de transformer leur entreprise en maison de retraite. Convaincus que leur société était leur meilleur hospice imaginable, les deux organisations patronales ont craint à avoir de nombreux cadres et employés à licencier. Aujourd'hui, en effet, ils peuvent à 65 ans mettre d'office à la retraite leurs collaborateurs avec ou sans leur accord.

Cette possibilité est de toute façon contraire aux directives européennes et à la jurisprudence française comme européenne. En effet, il est interdit de renvoyer une personne en se fondant sur son âge. Il s'agit d'un cas classique de discrimination.

Que ce soit 65 ou 70 ans, le raisonnement est le même tout comme l'illégalité de la mesure.

Par ailleurs, tout salarié conserve avec le texte en discussion la possibilité de prendre sa retraite à partir de 60 ans et à 65 ans, il peut la prendre à taux plein.

Il faut souligner à sujet que la France est le pays qui a l'âge légal de départ à la retraite le plus faible. Il est de 60 ans contre 65 ans en moyenne au sein de l'Union européenne ; certains pays l'ayant déjà relevé à 67 voire 69 ans.

mardi 11 novembre 2008

Le plan de relance chinois

Philippe Crevel est intervenu sur RFI au sujet du plan de relance engagé par le Gouvernement chinois afin de lutter contre les effets de la crise financière. Ce plan de plus de 550 milliards d'euros succèdent à un plan d'équipement de 200 milliards d'euros. La Chine est confrontée au ralentissement de l'économie occidentale ainsi que qu'à celui post jeux olympiques.

Pour écouter l'interview

le retour des lignes Maginot

Face à une crise, la tentation du regard vers l'arrière est de règle. La crise de 2008 ne serait que la réédition de la crise de 1929. Pour en sortir, il suffit d'appliquer les mêmes solutions. C'est au nom de ce principe bien connu que l'on prépare la future guerre avec les armes et la stratégie de la précédente. Or, à chaque fois, ce sont ceux qui sorti des chemins battus qui ont gagné.

Le parallélisme avec la crise de 1929 est aujourd'hui mis en avant du fait de la spéculation financière qui a prévalu depuis 2001 et par la crise immobilière et bancaire qui en a résulté.

Néanmoins, il ne faut pas oublier le contexte. 1929 a été précédé d'une période de rattrapage avec la première guerre mondiale et le désarmement qui l'a suivi. Les destructions, les pertes humaines accrues par la grippe espagnole ont débouché sir une soif d'oublier ce lourd passé. Une frénésie économique a marqué les années vingt d'autant plus que les alliés ont adopté des mesures pour alléger le fardeau du remboursement allemand au titre de la dette de guerre. Les années vingt ont été qualifié d'années folles.

La crise de 1929 est une crise très centrée sur les Etats-Unis et sur l'Allemagne qui avait contracté le virus de l'inflation. La crise ne s'est répandu à l'Europe que progressivement. La France a été touchée tardivement, au départ de manière moins brutale mais in fine de mainière plus lourde d'autant plus que la plaie démographique ne s'était pas refermée. La France enregistrait une perte nette en matière de population.

La crise de 1929 a été amplifiée par la volonté des gouvernements notamment français de maintenir la parité de change de l'or au prix d'une perte de compétitivité des produits à l'exportation. Le système de changes flottants en vigueur depuis 1976 a complètement changé la donne.

L'économie mondiale en 1929 se limitait aux Etats-Unis, A Royaume-Uni, à l'Allemagne, à la France et à l'Italie. Les pays européens tentaient de vivre en autarcie avec leur empire. L'Italie avec l'arrivée de Mussolini en 1922 opte pour le protectionnisme. Aujourd'hui, le taux d'ouverture de l'économie française est de 33 % trois à quatre fois supérieur à ce qu'il était alors. Aujourd'hui, l'économie mondiale s'étend à l'Asie, à l'Europe de l'Est, à la Russie, à l'Amérique latine....

Autre point de dissemblance, la vitesse de circulation de l'information. L'information en directe et la surréactivité par émotivité des marchés compliquent la donne.

Enfin, il faut prendre en compte le développement des systèmes d'intervention publique. Dans les pays occidentaux, les pouvoirs publics collectent entre 35 et 50 % du PIB quand dans les années vingt le taux tournait autour de 25 %.

L'emballement financier des huit dernières années est surtout le produit de l'argent pas cher. Il faut revenir à des taux d'intérêt plus en phase avec le taux de croissance potentiel.

La durée de la crise japonaise devrait attirer notre attention. Le maintien de taux d'intérêt négatifs n'a pas permis de relancer l'économie. La sortie de la crise passera par les gains de productivité et par une refondation de l'offre.

Depuis huit ans, l'économie mondiale a été droguée par les taux d'intérêt faibles et les gains procurés par les importations à bas coûts des pays émergents. La destructuration de l'offre à l'échelle mondiale ainsi que la multiplication des déséquilibres financiers et commerciaux ne pourront pas être corrigées par la fameuse régulation appelée par tous.