samedi 6 décembre 2008

Les Consommateurs sont à l'Ouest, les producteurs à l'Est

Les Consommateurs sont à l’Ouest et les producteurs à l’Est…



La Banque Centrale Européenne a abaissé son taux principal de 75 points en le fixant à 2,5 %. Cette baisse est la plus forte depuis la création de l’euro. Après avoir durant le premier semestre 2008 souligné que la principale menace était l’inflation, la BCE désormais tente de freiner le train d’enfer de la récession. L’économie mondiale est passée au galop d’un risque d’inflation à celui de la déflation. Jamais les banques centrales et les Etats n’ont mis sur le marché autant de liquidités, plans de sauvetage des banques, plus de 1000 milliards de dollars, plans de relance, plusieurs points de PIB…, baisse des taux et émission de liquidités. Face à cet ouragan de dollars et d’euros, les experts ont-ils pris le temps d’en analyser les conséquences. Certes, en période de crise, c’est au pied du mur que l’on reconnait le bon maçon. Cette surenchère peut accentuer le climat de défiance. Si les pouvoirs publics injectent autant de milliards, cela signifie que la crise est grave et qu’il est urgent de ne rien faire. Autre conséquence possible, il faut mieux attendre demain ou après demain car de nouvelles baisses d’intérêt interviendront, le prix de l’immobilier baissera encore. Il en résulte dans l’un ou dans l’autre cas l’enclenchement d’une spirale déflationniste et d’une trappe à liquidités.

L’autre possibilité est le retour de l’inflation car la planche à billets et la multiplication des dettes ne peuvent ne pas être neutre sauf à accepter un bouleversement des équilibres économiques mondiaux. Que feront les Chinois et autres investisseurs des pays émergents des milliards de dollars de créances qu’ils possèdent si le dollar plonge à nouveau et que l’économie américaine ne redémarre pas ? Aujourd’hui, les consommateurs sont à l’ouest et les producteurs à l’est. Les consommateurs de l’ouest vivent à crédit et sur leurs actifs ; quand ces derniers auront fondu, de quoi vivront les cigales ? A la fin des années soixante-dix, les Etats-Unis avaient rebondi grâce au décollage de l’informatique et de la netéconomie. Disposent-ils d’une nouvelle martingale pour échapper au déclin ?

La crise de 2008 est la première crise de l’économie mondialisée du moins dans sa version post mur de Berlin. Elle se caractérise surtout par sa rapidité de déploiement ainsi que par sa gestion médiatique sans précédent.

Crise exceptionnelle sans nul doute et qui avait commencé avant la faillite de Lehmann Brothers ; pour s’en convaincre, il suffit d’analyser les chiffres des faillites d’entreprises qui avaient progressé depuis le mois de mars. Les effets de la vive progression des cours de l’énergie et des matières premières ont été sous-estimés sur l’économie réelle. La crise financière en réduisant les facilités de crédit a été le coup de grâce pour de nombreuses entreprises qui étaient déjà sur le fil du rasoir. Depuis de nombreuses années, les experts prédisent un krach dans le secteur de l’automobile. Les constructeurs américains sont, en effet, asphyxiés par le système de retraite et de protection sociale de leurs salariés. Menacés par les constructeurs japonais dans les années quatre-vingt, un semblant d’équilibre s’était dessiné depuis vingt ans. Les constructeurs étrangers pour réussir à vendre aux Etats-Unis ont compris qu’il fallait produire sur place. Nissan, Toyota, BMW… ont construit des usines sur le continent nord-américain. Ce Yalta de l’automobile n’a pas incité les constructeurs américains à améliorer leur productivité et à rechercher de nouveaux axes de développement. En Europe de l’Ouest, les constructeurs automobiles ont opté pour la délocalisation de leurs usines aidés en cela par la proximité de l’Europe de l’Est. Le maintien, par exemple, en France, d’usines de production, est lié à l’octroi de fortes exonérations de charges sociales sur les bas salaires. La saturation du marché occidental, l’augmentation des cours du pétrole et la fermeture du robinet du crédit ont provoqué un séisme sans précédent dans le secteur phare de l’économie occidental du XXième siècle. Il est évident qu’aujourd’hui, il y a deux ou trois constructeurs généralistes de trop.

Les consommateurs de l’Ouest seront-ils redevenir des producteurs, des innovateurs et les producteurs de l’Est sauront-ils créer un marché intérieur et développer leur recherche ? Les réponses à ces interrogations conditionnent la sortie de crise qui peut être pour 2009 mais aussi pour beaucoup plus tard si les démons du protectionnisme, de la non-coordination et de la spéculation monétaire reprennent le dessus.

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